Exit le molleton et le mou. C’est le temps de s’habiller à nouveau. Oui, c’est vrai! «Enfin», vont pousser un soupir de soulagement les vrais passionnés de mode qui tiennent à se montrer sous leur meilleur jour chaque fois que l’occasion se présente.
Après plusieurs saisons où l’on a presque complètement délaissé le costume et la cravate, les temps changent. Sur les podiums des défilés Prada et Gucci à Milan – les poids lourds de l’influence mode, il va de soi — les cravates font un grand retour pour l’automne/hiver 2024. (L’invitation pour Prada comprenait d’ailleurs une cravate en soie avec une photo de forêt). La raison? Le retour des événements plus formels, mieux s’habiller pour le bureau parce que ça fait tout simplement du bien et, comme toujours, le besoin de nouveauté en mode masculine.
Après avoir vu les dirigeants de plusieurs nations au G7 de 2022 porter des chemises blanches de prix à col ouvert — mais pas une seule cravate —, c’est peut-être le temps de faire autrement. S’habiller mieux. Et porter la cravate. On sait que la mode, de par sa nature, est cyclique, et même des éléments qui peuvent sembler menacés d’extinction, comme la cravate, ont des chances d’être réhabilités. On en est là.
À l’ère des vêtements confo, on a oublié que la mode possède cette qualité intrinsèque permettant de soigner son apparence et, par la même occasion, d’être généreux dans la façon dont on se présente à autrui. C’est un peu comme lorsqu’on dresse la table pour un dîner chic entre amis. On veut bien les accueillir pour qu’ils se sentent bien. C’est cette même qualité qui transcende les tendances.
S’habiller pour les autres est un geste de générosité. Il ne faut jamais sous-estimer la joie qu’un beau vêtement ou un accessoire audacieux peuvent procurer aux autres. Lorsqu’ils sont portés avec une présence authentique, ils font rayonner la personne qui les porte et, par le fait même, cela fait du bien à ceux qui les voient. La grâce et l’éclat réunis. C’est nice.
Finies, les règles
Autrefois symbole d’un certain uniforme professionnel et l’un des derniers bastions de la tenue classique du vendeur, la cravate passe de «tenue obligatoire à celle que l’on porte par plaisir», affirmait Christophe Goineau, directeur de création de la soie masculine chez Hermès, à Bloomberg en mai 2023.
Et les règles rigides ne s’appliquent plus.
Les cravates à rayures ou à motifs cachemire peuvent maintenant être portées avec des chemises à imprimé fleuri, et même le simple hoodie peut être rehaussé par une chemise Oxford bien coupée et une cravate classique. C’est la mentalité des hommes très stylés qui est en train de changer le statu quo de la cravate.
Les experts ont également remarqué que, depuis quelques années, le côté plus mince de la cravate dépasse le bord plus large du devant. Apparemment, c’est une façon plus décontractée de porter la cravate comme véritable accessoire qui ponctue une tenue, ailleurs que pour les occasions formelles. Et pourquoi pas?
Selon Will Welch, directeur éditorial international du magazine GQ, dans une interview accordée à Business of Fashion, «ce n’était pas très conscient à l’époque, mais, avec le recul, je crois que l’envie de porter une cravate tous les matins était en réaction directe au début de la fin de la pandémie», explique-t-il. Il est évident que Will est un passionné de mode dans sa vie professionnelle et personnelle, mais son envie de porter des vêtements plus formels est probablement un baromètre de ce que d’autres hommes ressentaient, eux aussi.
Le printemps 2024 annonce un changement
Le changement a fait apparition à l’automne 2023, avec le dévoilement des collections printemps-été 2024 pour hommes. Quatre pour cent des looks comprenaient une cravate. Oui, cela peut sembler très peu. Sauf que ce chiffre représentait trois pour cent de plus que lors des collections printemps des années précédentes. À Paris, dans les boutiques haut de gamme Hermès et Charvet, les ventes ont connu une hausse de plus de dix pour cent au cours de la dernière année.
Est-ce que cela veut dire que les hommes sont prêts à porter la cravate, de nouveau?
Selon Bloomberg Business, les ventes de cravates ont augmenté pendant les deux dernières années, mais elles restent en deçà des chiffres de 2019, même si l’on s’attend à ce que les volumes des cravates à prix accessible (celles à 50 $) augmentent elles aussi. Étonnamment, les ventes de pochettes ont également augmenté depuis deux ans.
Ce qui en dit long sur l’idée de bien s’habiller.
Bien que le nombre de personnes portant la cravate pour aller travailler a diminué, il y a toujours des hommes qui choisissent de porter une cravate pour une réunion importante ou une occasion spéciale. Même si l’on s’attend toujours à voir un homme porter une cravate ou un noeud papillon pour son mariage ou des funérailles (sans jeu de mots, ici!), l’envie de porter la cravate pour se démarquer est probablement plus importante, car c’est une minorité qui la porte maintenant. On s’éloigne alors de l’idée d’un uniforme pour se rapprocher du port d’un accessoire qui distingue la personne qui le porte. Intéressant.
C’est peut-être la même chose pour les champions des e-sports qui portent à l’occasion le costume cintré et la cravate. En 2020, Dior a créé une collection capsule Air Dior de prêt-à-porter et d’accessoires en collaboration avec JackeyLove, superstar du gaming en Chine. La marque de luxe a ensuite commandité l’équipe du joueur en lui offrant des costumes classiques pour la cérémonie de remise des prix d’un tournoi. Et, oui, certains joueurs portaient des cravates. Êtes-vous prêts à jouer le jeu de la cravate, aussi?
